Autrefois, construire un meuble signifiait s’armer d’un tournevis, de bon sens et d’un peu de mauvaise foi.
Aujourd’hui, il faut surtout maîtriser le langage codé des notices d’assemblage… qui semblent avoir été rédigées par un comité de méduses sous anxiolytiques.
Bienvenue dans le royaume du schéma sans âme
Tu ouvres la boîte.
Tu étales les pièces.
Et là… le vide. Pas celui du meuble. Celui de la compréhension.
La notice te regarde avec ses yeux invisibles, et te dit :
« Figure 1A : insérez B7 dans C4 avec la vis E9. »
Et toi, tu cherches désespérément la pièce B7, qui ressemble à toutes les autres mais en légèrement plus déprimée.
Aucun mot. Que des pictos.
Tu es censé deviner le sens de la vie (et du montage) à partir d’un petit bonhomme souriant qui lève un tournevis.
Tu cherches l’émotion. Tu trouves une figure géométrique.
Aucune phrase. Aucune consigne.
Seulement ce silence absurde des notices muettes, comme si la clarté était une option premium.
Et ce sourire… ce sourire.
Tu sais, ce petit dessin d’un bonhomme content avec son meuble fini.
Lui, c’est un menteur professionnel.
Un manipulateur d’émotions plates.
Il veut te faire croire qu’en trois étapes simplifiées, tu auras monté une étagère parfaite.
Mais toi, tu es à l’étape 2 depuis 2h, en train d’essayer de comprendre si la planche doit aller à gauche ou à l’envers de ton estime de toi.
L’humiliation intégrée
Tu vis un supplice où chaque vis semble te murmurer :
« Ce n’est pas la bonne, mais vas-y, essaie quand même. »
Et quand enfin tu penses avoir terminé, il te reste trois pièces.
Trois.
Et une question : étaient-elles en trop ? Ou ton meuble va-t-il s’écrouler dans six jours ?
Et si le meuble, c’était nous ?
Peut-être que ces notices sont là pour nous rappeler un principe fondamental de la vie moderne :
Tu es seul. Personne ne t’aidera. Et tu devras quand même faire semblant d’avoir compris.
Finalement…
On ne monte pas un meuble.
On monte une énigme existentielle.
Et chaque vis perdue est un fragment de patience qui s’envole.
Alors la prochaine fois que tu croises une notice muette avec un bonhomme qui sourit, fais comme moi :
Râle un bon coup. Et tourne la planche dans l’autre sens