Autrefois, on allait au guichet.
On prenait un ticket, on attendait une heure (ou deux), et quelqu’un derrière une vitre nous disait :
« Il manque le formulaire B47 bis. »
C’était simple. Cruel, mais simple.
Aujourd’hui ?
On navigue dans des portails numériques conçus par des esprits tordus ayant manifestement lu trop de Kafka et joué à trop de escape games.
- Vous souhaitez un certificat ?
👉 Créez un compte (avec mot de passe à 18 caractères dont un emoji).
👉 Recevez un mail de validation qui expire en 30 secondes.
👉 Téléversez un justificatif de domicile datant de moins de trois jours ouvrés. - Problème ?
Le chatbot de l’administration (baptisé « AideMax ») répond :
« Je n’ai pas compris votre demande. Veuillez reformuler en sanskrit. » - Besoin d’un humain ?
Option indisponible.
(Ou alors dans six mois, entre 8h12 et 8h17.)
La tyrannie de l’autonomie forcée
Les autorités adorent dire :
« Simplifiez vos démarches en ligne. »
Traduction :
« Débrouillez-vous tout seul. Et si vous échouez, c’est votre faute. »
Le citoyen moderne devient auto-administré.
On ne reçoit plus de services publics :
On devient gestionnaire de son propre cas, dans un jeu vidéo où le boss final s’appelle « Case non traitée ».
Et si l’on persiste ?
Pour les résistants (ceux qui osent encore appeler un numéro de téléphone) :
- Appuyer sur 1, puis sur 4, puis sur 7.
- Attendre.
- Tomber sur une musique d’attente qui aurait déjà poussé Confucius à perdre patience.
À la fin ?
« Toutes nos lignes sont occupées. Rappelez plus tard. »
Bienvenue dans l’ère du self-service administratif.
On est client, employé… et parfois même victime de sa propre administration.
Avec un peu de chance, on finira peut-être par obtenir ce fameux papier.
Sinon ?
Recommencez. Nouveau mot de passe requis.