Écrire un roman ? Long, exigeant, épuisant.
Remplir un formulaire Cerfa ?
Pire.
Parce que dans ce pays, rien n’existe tant qu’un Cerfa ne l’a pas validé.
Ton nom, ton logement, ton travail, ton chat.
Même pour dire que tu n’as rien à déclarer, il faut… le déclarer. En trois exemplaires.
Développement : Cerfa, cette poésie administrative
Le Cerfa, c’est la France.
C’est ce petit numéro en haut à droite qui te regarde comme un surveillant de bac.
Il change tout le temps, mais reste le même.
Il contient 8 pages, 15 cases obligatoires, et un tableau annexe à renvoyer en double.
Cerfa veut dire : « Centre d’enregistrement et de révision des formulaires administratifs ».
Mais en vrai, ça signifie :
« Courage, écrivain, rien de fonctionnel à l’horizon. »
Les grandes œuvres du Cerfa
- Cerfa 13750*05 : pour déclarer que ta voiture est à toi (même si tu l’as achetée, payée, assurée, et que tu dors dedans).
- Cerfa 2042 : pour déclarer tes impôts, avec 14 sous-formulaires qui se contredisent.
- Cerfa 15646*01 : pour autoriser ton ado à quitter le pays… mais pas trop vite quand même (l’administration a besoin de lui)
- Cerfa 123456-MD (inventé, mais qui arrivera un jour) : pour signaler que tu respires sans intention fiscale.
Quand tu veux être écrivain… et que l’État veut un Cerfa
Tu veux créer ton activité d’auteur indépendant ?
Le site officiel t’accueille avec enthousiasme :
« Merci de remplir le formulaire PO-i, le Cerfa 11921*05. Puis l’ACRE. Puis l’URSSAF. Puis un vœu à la pleine lune. »
Tu écris 60 000 mots.
Mais l’administration veut un code APE.
Et attention : si tu choisis 9003B au lieu de 9003A, tu pourrais devenir, au choix :
– magicien à temps partiel,
– acrobate rémunéré,
– ou suspect fiscal.
La vraie poésie française, c’est ça
Le Cerfa est un genre littéraire en soi.
Un mélange de roman kafkaïen, de théâtre absurde et de sudoku maléfique.
Les champs obligatoires ne le sont pas.
Les signatures doivent être manuscrites, scannées, mais aussi tapées.
Et il faut parfois cocher « je ne suis pas concerné » pour être concerné.
Pourquoi faire simple quand on peut faire Cerfa ?
C’est une question de tradition.
Le Cerfa est notre Louvre du labyrinthe.
Notre tour Eiffel de la paperasse.
Notre baguette de complexité nationale.
Et avouons-le : sans Cerfa, les cafés seraient pleins d’écrivains productifs.
Heureusement, l’État veille à ce que tu perdes 3h pour déclarer… que tu n’as rien à déclarer.
Conclusion lucide
Le formulaire Cerfa, c’est la preuve que le vrai génie français, c’est de transformer l’évidence en casse-tête légal.
Là où un mail suffirait, on te demande un cachet humide, une pièce jointe, et ton groupe sanguin.
Alors oui, tu peux écrire une trilogie en 6 mois.
Mais tu ne pourras pas t’inscrire à la Maison des artistes sans appeler trois organismes, deux oracles et un conseiller URSSAF traumatisé.
Et si jamais tu veux te plaindre ?
Il existe sûrement un Cerfa pour ça.