Tu as écrit un roman.
Tu l’as relu, corrigé, torturé, chéri, détesté, puis adoré à nouveau.
Tu t’es dit : « Il est prêt. »
Et là, tu entres dans une autre dimension : la recherche d’une maison d’édition.
Bienvenue dans le Hunger Games du monde littéraire, version paperasse, formules de politesse et déceptions silencieuses.
Étape 1 : Croire encore à la magie
Tu tapes « envoyer son manuscrit à une maison d’édition » sur Google.
Tu tombes sur des articles datés de 2012, des forums peuplés d’âmes en peine, et un PDF du CNL (Centre national du livre) qui ne te sauve pas.
Tu te dis :
« Je vais viser les grandes. Gallimard. Actes Sud. Albin Michel. On ne sait jamais. »
Mais tu sais.
Au fond, tu sais.
Étape 2 : Préparer le dossier (aussi lourd qu’un dossier de prêt immobilier)
La plupart demandent :
– Une version papier, format A4, interligne 1,5 (surtout PAS 2 ?)
– Une lettre d’intention (pas trop prétentieuse, mais pas trop banale non plus)
– Une note d’intention différente de la lettre, évidemment
– Un pitch de 400 caractères
– Un synopsis détaillé
– Une bio littéraire, mais pas trop personnelle, sauf si tu es orphelin d’astronaute
– Et un Cerfa 243-P pour prouver que tu n’es pas une IA
Et attention, pas d’agrafe, mais pas de trombone non plus.
Juste des feuilles volantes, avec ton sang en dédicace.
Étape 3 : L’attente (version ralenti)
Tu envoies ton chef-d’œuvre par La Poste (parce que « nous ne lisons pas les PDF, merci de votre compréhension »).
Et tu attends.
Deux semaines passent.
Puis trois mois.
Puis un an.
Parfois, tu reçois un accusé de réception.
Parfois, un mail automatique qui commence par « Bonjour, » et se termine par « Courage. »
Le plus souvent ?
Rien. Le silence.
Un silence épais, visqueux, ponctué de doutes existentiels.
Étape 4 : La réponse (quand il y en a une)
Le Graal, c’est un mail personnalisé.
Mais tu reçois surtout :
« Nous avons bien reçu votre manuscrit. Malheureusement, il ne correspond pas à notre ligne éditoriale. »
Tu relis la ligne éditoriale.
C’est flou.
Ton livre colle pourtant. Mais bon… peut-être pas assez de pandas polyamoureux ou de dystopies sous acide.
Étape 5 : Le doute
Tu envisages :
– L’autoédition.
– Le vaudou.
– De créer ta propre maison d’édition avec un nom pseudo-poétique genre « Les Plumes Dissonnantes » (oui, avec deux N, c’est plus intense).
Étape 6 : Tu recommences
Parce que tu es obstiné(e).
Parce que tu y crois encore.
Parce qu’au fond, tu n’écris pas pour être publié…
Mais ne pas être publié te donne envie de frapper quelqu’un avec ton manuscrit.
Conclusion lucide
Chercher une maison d’édition, c’est comme glisser ton âme dans une enveloppe kraft et espérer que quelqu’un, quelque part, dira « oui ».
C’est absurde. Lourd. Injuste.
Mais aussi, parfois, miraculeux.
Alors tu continues.
Tu écris un nouveau texte.
Tu corriges l’ancien.
Tu retravailles ta lettre.
Et tu continues à croire — un peu — que l’un d’eux verra en toi autre chose qu’un mail de plus dans la boîte.
Et si ce n’est pas le cas… il te reste toujours le blog. Et la vengeance littéraire.