Ah, l’écriture.
Ce moment magique où tout coule, où l’on se prend pour Victor Hugo sous stéroïdes.
Puis vient la relecture.
Et là, le mirage s’effondre.
Première relecture : l’euphorie du génie incompris
Tu relis ton texte.
« Franchement… c’est pas mal du tout. »
Tu t’auto-congratules.
Tu envisages déjà le Goncourt. Ou, à défaut, une publication sur LinkedIn avec 14 likes.
Deuxième relecture : la douche froide
« Attends… Cette phrase n’a aucun sens. Cette métaphore ? Un hérisson sur un vélo ? »
Ton ego prend un premier coup.
Tu modifies trois mots et tu respires un grand coup.
Tout va bien. Tout est sous contrôle.
(Mensonge n°1.)
Troisième relecture : la remise en question existentielle
Chaque phrase te semble écrite par ton chat sous l’effet de l’herbe à chat.
Tu découvres :
- Des répétitions que même un perroquet éviterait.
- Des phrases si longues qu’elles nécessitent une pause café au milieu.
- Des idées brillantes… hier soir. Pas aujourd’hui.
« Suis-je vraiment fait(e) pour écrire ? Ou devrais-je envisager la menuiserie ? »
(Spoiler : non. La scie sauteuse et toi, ce serait pire que tes phrases bancales.)
Le saboteur intérieur prend le contrôle
C’est à ce moment que ton cerveau décide de t’envoyer toutes les critiques que tu as lues sur Amazon ou Babelio :
- « Style poussif. »
- « Trop long. »
- « On ne comprend rien. »
Ces critiques ne concernent même pas ton livre.
Mais ton cerveau s’en fiche.
Il est déjà en mode auto-sabotage.
Petit manuel de survie : relire sans sombrer
➡ 1. Relis à voix haute.
Ton oreille est moins indulgente que tes yeux.
(Si tu t’essouffles avant la fin d’une phrase, coupe-la. Littéralement.)
➡ 2. Change de police ou imprime.
Ton texte semblera écrit par quelqu’un d’autre. C’est bête, mais ça marche.
➡ 3. Accepte l’imperfection.
Même les chefs-d’œuvre ont des défauts.
(Tu crois que Flaubert ne s’est pas arraché les cheveux sur Madame Bovary ?)
➡ 4. Fuis la relecture éternelle.
À force de corriger, tu finis par détruire.
À un moment, il faut arrêter.
(Sinon, ton texte finira aussi nu qu’un budget ministériel après trois commissions.)
Conclusion : aimer son texte… un jour
Relire, c’est râler.
Relire, c’est douter.
Relire, c’est s’énerver contre soi-même.
Mais relire, c’est surtout progresser.
Ton pire ennemi (ton œil critique) est aussi ton meilleur allié.
Un texte parfait n’existe pas.
Un texte peaufiné, sincère et assumé ?
Ça, oui. Et c’est déjà énorme.