Écrivain.
Huit lettres.
Un mot qui fait rêver… ou flipper.
Tout dépend si tu le dis à une éditrice… ou à ta belle-mère.
L’instant de vérité
Tu es dans une soirée.
Ou pire, dans une file d’attente.
Et là, LA question :
“Et toi, tu fais quoi dans la vie ?”
Tu hésites.
Tu pourrais dire “rédacteur indépendant”. Ça passe. Ça rassure.
Tu pourrais dire “freelance dans le secteur littéraire” (avec un haussement de sourcil inspiré).
Mais non. Tu dis la vérité.
“Je suis écrivain.”
Et là… silence.
Le regard qui se fige.
Le sourire poli.
La personne en face cherche si elle a lu un truc de toi. (Spoiler : non.)
Puis elle demande, entre deux gorgées de vin tiède :
“Mais… genre écrivain écrivain ? Genre… c’est ton vrai métier ?”
Quand le mot “écrivain” déclenche une expertise Pôle Emploi
Car oui, dans la logique administrative, écrivain n’est pas un métier.
C’est un hobby, un symptôme, ou une excuse pour glander en pyjama.
Tu veux t’inscrire à l’URSSAF ? On te demande ton code APE.
Tu veux une carte professionnelle ? On te répond “Vous avez des revenus réguliers ?”
Tu veux une reconnaissance sociale ? Il te faut… un prix littéraire, un film adapté de ton roman, ou au minimum un passage chez Léa Salamé.
Et entre deux manuscrits refusés, tu expliques à EDF que “oui, vous allez être payé, mais seulement si quelqu’un accepte enfin ce roman que j’ai mis 2 ans à écrire pour 0 euro”.
Être écrivain, c’est suspect
Parce qu’écrivain, c’est flou.
Ça n’a pas d’horaires. Pas de collègues. Pas de badge.
Tu travailles chez toi, dans un carnet, ou sur une nappe de bar : forcément, tu caches quelque chose.
Et si tu précises que tu fais aussi de la chronique, un blog, un podcast littéraire…
Alors là, c’est foutu : “Donc t’es influenceur ?”
Non. Je suis juste en train d’écrire sur le fait que je n’arrive pas à expliquer que j’écris.
Le paradoxe existentiel
Quand t’écris, t’as l’air de rien faire.
Quand tu fais semblant de rien faire, t’écris intérieurement.
Et quand tu publies enfin, on te demande pourquoi t’as pas plutôt passé le CAP Pâtisserie. (Au moins, ça se mange.)
Ton entourage te soutient, mais à sa façon :
- “Tu vas écrire un vrai livre un jour ?”
- “Et t’as pensé à l’auto-édition ?”
- “Tu devrais écrire un truc comme Musso, ça se vend bien.”
La société adore les livres. Mais elle se méfie des écrivains.
Tu veux des lecteurs, mais pas de pitié.
Tu veux de la reconnaissance, mais pas du mépris passif-agressif.
Tu veux juste pouvoir dire “j’écris” sans qu’on te réponde :
Conclusion
Être écrivain, ce n’est pas ne rien faire.
C’est faire plein de choses qu’on ne peut pas justifier sur un CV.
C’est prendre le risque d’être pris pour un rêveur, un parasite, ou pire… un passionné.
Mais tant pis.
Tu continueras à écrire, même si personne ne te croit.
Parce qu’au fond, tu sais que le vrai métier d’écrivain…
…c’est d’apprendre à le rester, même quand personne ne te lit.